mercredi 31 juillet 2013

Moi qui ne suis qu’un brin d’Hysope


Asperges me

Moi qui ne suis qu’un brin d’hysope dans la main
Du Seigneur tout-puissant qui m’octroya la grâce,
Je puis, si mon dessein est pur devant sa face,
Purifier autrui passant sur mon chemin.
Je puis, si ma prière est de celles qu’allège
L’humilité du poids d’un désir languissant,
Comme un païen peut baptiser en cas pressant,
Laver mon prochain, le blanchir plus que la neige.....
Verlaine

Dans ce poème-prière, Verlaine exprime le désir de pouvoir, tel l'Hysope purificateur de la Bible, soulager son prochain de ses peines. Comme le présente Guy Fuinel dans son livre "Plantes de Dieu, plantes des hommes", c'est dans un état d'esprit similaire que sont encore fabriqués dans des monastères des élixirs de santé, avec la conscience que ce travail de mise à disposition de la richesse des plantes rend un hommage "à la Création et à son Auteur". Vous retrouverez l'Hysope notamment dans "l'Eau d’Émeraude". Cette préparation n'est pas destinée à être bue. On peut la prendre en gargarisme et bain de bouche. On l'utilise surtout en application locale, en compresse ou en friction. Madame de Sévigné en faisait déjà l'éloge après un accident de carrosse : "Je mets une Eau d’Émeraude si agréable que, si je ne la mettais pas sur ma jambe, je la mettrais sur mon mouchoir....[Cette Eau d’Émeraude] qui guérit, console et perfectionne tout, tout en sentant divinement bon". Vous pouvez en savoir plus en cliquant sur le lien suivant : Eau d'Emeraude".



Restons dans la tradition, tout en se tournant vers des valeurs très terrestres. Pour les amateurs de saveurs anciennes, il est possible de fabriquer avec cette plante une liqueur au goût un peu mentholé et un peu âpre que l'on aura plaisir à déguster glacée dans de tous petits verres dénichés dans les placards des aïeuls ou trouvés dans une brocante. Voici donc une recette de "Liqueur à l'Hysope". Vous ferez macérer une poignée de sommités fleuries d'Hysope dans 1 litre d'alcool à 90° pendant 15 jours. Puis après l'avoir filtrée, vous dédoublerez cette macération avec un sirop obtenu en faisant fondre à petit feu 500 gr de sucre dans 1 litre d'eau. Mettez en bouteille et laissez vieillir avant dégustation (avec modération bien sûr !).


Pour rester dans l'esprit de l'Hysope, je terminerai cet article Z'amoureux en dédiant à cette plante la  locution latine :

"Dum spiro spero",

"Tant que j'inspire, j'espère"


Pour la suite de mon dictionnaire Z'amoureux, j'aimerai maintenant discourir de "I" comme "Immortelle", une plante au parfum de vacances.

Merci de votre visite et à bientôt !

Philomènement vôtre.


dimanche 28 juillet 2013

L'Hysope des médecins

Illustration de l'Hysope tiré du Taccuinum Sanitatis (14e siècle)

L'Hysope était une plante sacrée pour les Hébreux. Comme plante guérisseuse, elle faisait également partie de la pharmacopée des Nehemiah (nom hébreux des apothicaires et parfumeurs), en compagnie de l'Aloes, l'Armoise, le Balsamodendron, le Coloquinte, les noix de Caroubier, la Coriandre, le Fenouil, la Grenade, ....

Parmi les nombreux usages médicinaux qui ont pu être faits de l'Hysope, une grande constante est son utilisation en cas d'affections pulmonaires. Ainsi, on retrouve cette prescription dans la compilation de "conseils pour vivre longtemps" de l'Ecole de Salerne. Situé en Italie, Salerne fut un centre de soins et d'enseignements médicaux de haute renommée pendant le moyen-âge. Le "Regimen Sanitatis", ouvrage rédigé vers 1060 et largement recopié, traduit dans de nombreuses langues et diffusé jusqu'à la fin de la renaissance, se compose de petits poèmes didactiques en latin. Voici celui sur l'Hysope :

Hussopus est herba purgans a pectora phlegma ;
Ad pulmonis opus cum melle coquatur hyssopus ;
Vultibus eximium fertur praetare colorem.

Pour ceux qui ne sont pas des latinistes distingués, en voici la traduction en vers français faite par Charles Meaux Saint-Marc, dans une édition de 1860 :

L'Hysope du poumon purge le phlegme humide;
D'Hysope cuite au miel le poumon est avide,
Lorsqu'une toux chronique allume sa chaleur ;
L'Hysope du visage embellit la couleur.



Grâce à ses propriétés émollientes et expectorantes, L'Hysope officinale (Hyssopus officinalis) est encore utilisée de nos jours dans les cas de toux grasses voire oppressantes, avec fort encombrement des bronches. Pour l'herboriste Marie-Antoinette Mulot, "c'est un merveilleux expectorant, qui assèche, puis qui favorise la respiration par action sur les centres nerveux". Sous avis médical et avec toute la prudence qui s'impose pour cette pathologie, l'Hysope peut même être prescrite dans les cas d'asthme sécrétoire. Car son effet mucolytique se fait sans "effet rebond" contrairement à d'autres plantes aux propriétés fluidifiantes.

Son côté stimulant peut par ailleurs être bénéfique pour relever le tonus des personnes fatiguées par la toux. Mais par mesure de précaution, l'usage médicinale de cette plante est déconseillée pour les personnes à risques épileptiques. De plus les personnes nerveuses, les enfants et les femmes enceintes ne doivent l'utiliser qu'à petites doses.

L'Hysope se prend traditionnellement sous forme de tisane, que vous préparerez en laissant infuser pendant 10 minutes, hors du feu et à couvert, 1 cuillerée à café de plante sèche dans 1/4 de litre d'eau bouillante. Vous prendrez de 2 à 3 tasses par jour jusqu'à amélioration (en sucrant avec du miel si besoin).

En phytothérapie, il est courant de préconiser des mélanges qui permettent de bénéficier de la synergie de plantes aux propriétés complémentaires. Voici, à titre d'exemple, une "Tisane respiratoire autour de l'Hysope" pour soulager vos toux grasses et encombrantes de l'hiver. Pour composer cette tisane, vous mélangerez les plantes séchées suivantes : 20 g d'Hysope, 20 g de bourgeons de Pin, 10 g de semences d'Angélique, 10 g de Matricaire (Camomille allemande), 10 g de fleurs deTilleul, 10 g de Menthe poivrée et 10 g de Lavande fine. Vous préparerez votre tisane en faisant infuser pendant 10 minutes, hors du feu et à couvert, une cuillerée à soupe du mélange pour 1/4 de litre d'eau bouillante.

En usage externe, l'Hysope a également des propriétés résolutives et vulnéraires qui peuvent être utiles en cas de coups ou de chute. Vous pourrez appliquer sur les ecchymoses, y compris en cas de contusion des yeux, une "compresse imbibée d'une décoction d'Hysope" faite avec 25 g de plantes séchées pour 1 demi-litre d'eau. Pour préparer cette décoction, vous laisserez bouillir à petits bouillon pendant 2 à 3 minutes avant de laisser infuser.



Cette plante aromatique donne après distillation à la vapeur d'eau, de l'huile essentielle. Mais attention, suivant la variété de plante, il existe deux chémotypes dont l'un présente une toxicité avérée. En effet, l'huile essentielle d'Hyssopus officinalis ssp. officinalis, contenant une forte quantité de cétones, est neurotoxique et abortive. Elle est donc interdite à la vente sauf prescription médicale.

Il existe également de l'huile essentielle d'Hysope dite "couchée" Hyssopus officinalis var decumbens, à très faible quantité de cétones, qui contient du 1,8 cinéole et qui peut donc être utilisée pour les affections broncho-pulmonaires.

Des adeptes de l'aromathérapie énergétique prêtent à l'huile essentielle d'Hysope couchée la faculté de développer l'intuition. Ainsi si vous désirez être davantage inspiré, voici un petit "rituel inspiratoire" .  Dans un espace calme, vous pouvez vous asseoir sur le sol, en tailleur ou en lotus (ou bien sur une chaise le dos bien droit et les deux pieds bien posés au sol). Vous appliquerez 2 à 3 gouttes d'HE d'Hysope couchée mélangées à 2 à 3 gouttes d'huile végétale dans la paume d'une de vos mains. Après avoir frotté vos mains l'une contre l'autre, vous les amènerez devant votre visage et vous ferez quelques respirations profondes. Ensuite, vous placerez vos mains paumes l'une contre l'autre et vous monterez vos bras au dessus de votre tête (ou bien vous poserez simplement vos mains sur vos jambes, paumes ouvertes, si cela est trop inconfortable) et vous resterez quelques instants en silence. Chut ! Ecoutez votre Muse ....

Il est vrai que l'Hysope est une plante "inspirante" à tous les points de vue. Pour la fin de mon article sur l'Hysope, je vous invite à partir en poésie avec Verlaine.

Merci de votre visite et à bientôt !

Philomènement vôtre.


mercredi 24 juillet 2013

Le parfum de l'Hysope des garrigues


"Mais la brise arrivait de l'au-delà. Sa nappe qui descendait des plateaux où poussent l'arnica sauvage, l'argeilas et l'hysope des garrigues, avait ramassé au passage tous les parfums cachés dans les petits vallons, blottis dans les creux tièdes, assoupis dans les moindres fissures du calcaire,...La montagne embaumait. Je ne résistai plus. Je passai le pont." 
Henri Bosco

Cette Hysope sauvage qui pousse encore dans les Alpes du Sud (surtout entre 1 000 à 1 500 mètres) se raréfie, car exposée à l'embroussaillement rapide et à l'installation des pins. Elle s'échappe parfois des cultures pour se ressemer au bord des champs secs et des routes. La variété cultivée, de plus grande taille, a un parfum plus fort et moins agréable que celui des formes sauvages. Mais comme l'Hysope a une souche fragile qui s'arrache facilement à la cueillette, laissez donc les sauvagines tranquilles et utilisez pour embaumer vos cuisines celle qui aura poussé dans votre jardin ou un jardin ami.

Pour prendre contact avec l'Hysope je vous propose quelques recettes toutes en simplicité, inspirées du livre "Découverte des Herbes de Provence" dans la collection "Carrés gourmands".

Nous commencerons le repas par une "Salade de haricots blancs à l'Hysope". Pour une tablée de 6 personnes, faites tremper 1/2 kg d'haricots blancs dans de l'eau froide pendant toute une nuit. Le lendemain vous les égouttez avant de les faire cuire à l'eau bouillante salée. Une fois cuits, passez-les sous l'eau froide et laissez égoutter. Dans un grand saladier vous préparerez une sauce avec une huile d'olive fruitée, le jus d'un demi citron, une gousse d'ail émincée, sel et poivre, auxquels vous ajouterez de nombreuses feuilles d'Hysope. Placez les haricots cuits sur le dessus et mélangez bien avant de servir.


Nous poursuivrons avec un lapin aromatisé à l'Hysope. Pour cette recette, il faudra au préalable avoir préparé du "Sel à l'Hysope". Ce n'est pas compliqué. Vous ferez sécher dans une poêle, à petit feu, du gros sel non raffiné puis vous le réduirez en poudre. De même, vous réduirez en poudre de l'Hysope séchée. Vous mélangerez une part de sel pour 5 parts d'Hysope. A stocker au sec.

Pour faire le "Lapin à l'Hysope", vous commencerez par frotter toutes les faces d'un lapin entier et vidé avec le sel d'Hysope, à laisser reposer sous un linge pendant 2 à 3 heures. Ensuite enveloppez le lapin avec 4 bardes de lard. Une fois ficelé placez-le dans un plat à four sur quelques branches d'Hysope. Arrosez-le d'un filet d'huile, saupoudrez de quelques feuilles d'Hysope et faites-le cuire à four chaud (thermostat 7) à raison de 20 minutes par 500 grammes.

Comme de nombreuses cousines aromatiques de la famille des Lamiacées, l'Hysope a quelques propriétés digestives, vous pouvez donc vous laissez aller tranquillement à ces plaisirs d'une table rustique !

Mais les vertus médicinales de l'Hysope ne s'arrêtent pas là. Elle a surtout acquis sa réputation comme puissant remède des affections des poumons. Je vous propose de vous en dire un peu plus dans la suite de mon article.

Merci de votre visite et à bientôt !

Philomènement vôtre.



dimanche 21 juillet 2013

A la découverte de l'Hysope


Originaire de l'Asie méridionale, l'Hysope a très vite conquis le bassin méditerranéen et les anciennes civilisations.

Ainsi l'Hysope est une plante sacrée des Hébreux. Elle est citée à nombreuses reprises dans la Bible dans les cérémonies de purification. Ces petites branches aux feuilles raides se prêtent bien à la fabrication d'un petit balai pour les aspersions.
"Purifie-moi avec l'Hysope, et je serai pur ..." Psaume (50,9)

C'est un tel pinceau d'Hysope que les Hébreux auraient utilisé pour marquer leurs portes du sang d'un agneau afin d'éviter que la mort ne l'ouvre et emporte leurs premiers-nés (dixième plaie d'Egypte, livre de l'Exode, XII, 22)

"Moïse convoqua tous les anciens d'Israël et leur dit : "Vous prendrez un bouquet d'Hysope et vous le plongerez dans le sang qui sera dans la cuvette, vous toucherez au linteau et aux deux jambages.[...] Quant à vous, nul ne sortira de la porte de sa maison jusqu'au matin.[...] ,alors le Seigneur ne permettra pas à l'exterminateur d'entrer dans vos maisons pour frapper."

Cette tradition est peut-être à l'origine du proverbe provençal : "Hysope dans le jardin chasse le médecin", c'est-à-dire la maladie et le risque de mort. Nous verrons dans la suite de l'article les propriétés médicinales de l'Hysope officinale (Hyssopus officinalis) connues depuis les temps les plus anciens.



Vous pouvez, vous aussi, cultiver l'Hysope dans votre jardin. Cette plante vivace forme un petit buisson de 20 à 50 cm qui fera belle figure en rocaille, en massif ou en bordure. Ses tiges nombreuses, semi-ligneuses portent de petites feuilles étroites. Ses  fleurs regroupées en épis sont de couleur bleue (parfois rose pourpre, voire blanche quelquefois en culture). Elle préfère les emplacements ensoleillés dans une terre plutôt sèche et bien drainée. On peut la cultiver en pot dans les régions où le climat est peu clément en hiver, car elle n'est rustique que jusqu'à -10°C. Elle nécessite alors un hivernage, à l'abri dans une pièce fraîche, jusqu'au printemps suivant. L'entretien est vraiment minime : nul besoin d'arrosage, sauf en cas de sécheresse prolongée, ou pour les sujets en pots. Seul impératif : une taille annuelle, après la floraison, pour que la plante demeure compacte et touffue, et pour favoriser la floraison l'année suivante.

L'Hysope est utile à proximité des arbres fruitiers, car c'est une plante mellifère qui attire les insectes pollinisateurs. Mais surtout cette plante aromatique, de la famille des Lamiacées, a sa place au potager. Ses feuilles et ses fleurs dégagent un parfum chaud, à la fois camphré, mentholé et épicé. La saveur de l'Hysope est particulière, amère, piquante et légèrement camphrée. Vous pourrez l'introduire dans votre cuisine pour réveiller les papilles. 

Au Moyen-âge, l'Hysope était associée à la Sauge pour assaisonner les soupes. En Provence, elle reste utilisée pour relever légumes et viandes. Et si nous allions maintenant faire un tour du côté des marmites et des popotes ...

Merci de votre visite et à bientôt !

Philomènement vôtre.